VENDREDI 29 NOVEMBRE À 18H30
en résonance de la 17e Biennale de Lyon
Les récits de soi et l’expérience de la réciprocité sont au cœur de la pratique de Carla Adra. À travers des expériences performatives collectives, elle organise des moments de rencontres, dans lesquels elle laisse sa voix à l’autre et tente de rendre audible une parole souvent disqualifiée dans la sphère domestique, urbaine ou institutionnelle. Intéressée par la psychanalyse, l’anthropologie et les pédagogies alternatives, elle propose des espaces-temps de rencontre et de mise en commun : conversations, duels et ateliers participatifs s’organisent selon des protocoles précis. Dans l’espace public ou au sein de structures, elle collecte des paroles en échange d’une histoire vécue, elle propose de déplacer le point d’énonciation, d’endosser un récit personnel comme on se revêtit du vêtement de l’autre, faisant résonner des témoignages individuels avec des expériences
partagées.
Fleurs de Peurs est une performance itinérante, qui prend la forme d’un marché temporaire, installé puis démonté, avec pour unique trace l’échange vécu. Dans chaque lieu où elle se déploie, un stand semblable à celui d’un fleuriste est tenu par une enfant de huit ans, vêtue de grandes ailes de papillon confectionnées par l’artiste. Les visiteurs y sont invités à échanger une peur personnelle contre une Fleur de Peur. L’enfant reçoit leurs peurs, inscrites sur des papiers, et choisit en réponse une Fleur de Peur à leur offrir. Ces Fleurs de Peurs sont issues d’une collection de peurs recueillies auprès d’enfants et d’adultes lors d’ateliers de médiation organisés dans l’exposition personnelle Se perdre sans peur (2024) de Carla Adra au centre d’art contemporain 40mcube, Rennes. Cette archive sensible, soigneusement conservée, est remise en circulation dans chaque espace traversé par la performance, interrogeant la peur non seulement comme expérience intime mais aussi comme matière sociale, rendue visible et partagée. L’enfant, figure centrale de ce troc, devient une « pollinisatrice de peurs ». À l’image des papillons qui, en transportant le pollen, assurent la fertilité et la diversité des écosystèmes, elle redistribue ces peurs, créant un mouvement de récits et d’émotions entre les visiteurs. Chaque peur confiée est reconnue et redistribuée dans un réseau d’échanges, où l’individu s’inscrit dans un dialogue collectif.
Cette performance fait écho à une œuvre antérieure de Carla Adra, Ailes (2019), dans laquelle des enfants répondaient à des problématiques d’adultes. Fleurs de Peurs poursuit cette réflexion en confiant aux enfants le rôle de médiateurs émotionnels, révélant leur capacité unique à capter et redistribuer des récits sensibles souvent négligés. Par ce marché éphémère, Carla Adra propose un espace d’échange où les peurs individuelles s’ouvrent à la réciprocité et à la mémoire collective, nous invitant à considérer la parole comme un acte d’écoute et de transformation sociale.
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Née en 1993 à Toronto (Canada), vit et travaille à Paris.
Carla Adra a étudié à l’École nationale d’art et de design de Reims, à l’Ontario College of Art and Design de Toronto et a intégré le post-diplôme de l’École Nationale des Beaux-Arts de Lyon entre 2018 et 2020. Lauréate du programme Magnetic organisé par Fluxus Art Projects, elle vient d’achever une résidence à Covepark (Écosse). Ses œuvres ont été acquises par le Fonds d’art contemporain – Paris Collections. Son travail a été récompensé par le prix Prisme en 2017.
Elle est représentée par la Galerie Valeria Cetraro (Paris).
Site de l’artiste.