EXPOSITION DU 02 AVRIL AU 22 MAI 2021
une proposition de Marianne Derrien, commissaire d’exposition
avec Tania Gheerbrant, Youri Johnson, Mahalia Köhnke-Jehl, Diego Wery.
« We both know what memories can bring,They bring diamonds and rust. » Joan Baez
C’est l’histoire d’une oxydation, marque du temps qui passe, de l’usure charnelle, caressante, étincelante. Une quête dans les profondeurs de l’esprit, du cœur et des corps, à la manière d’un trafic de souvenirs et de sens.
Le diamant, gage d’éternité, larme des dieux ou éclat d’étoiles tombés du ciel selon certains mythes, est ce matériau incassable tant désirable que source de conflits et d’exploitation. La rouille, réaction chimique qui oxyde et ronge les métaux, marque l’écoulement du temps par son effet destructeur. De ce paradoxe entre deux éléments quasiment incompatibles naît une rencontre qui porte l’idée même de sa perte, d’une éternité contrariée voire abîmée, érodée sous la forme d’une compression du passé et du futur.
Entre science, affect et fiction à l’ère d’Internet, des réseaux sociaux et de la globalisation des échanges, il y a un regard, ici ou là, qui veille et perçoit plusieurs mondes à la beauté souterraine. Telle une sentinelle amoureuse, cette exposition scrute l’horizon, se pose au bord d’œuvres à chérir avant la fin de quelque chose avec l’intuition de se laisser guider, plus ou moins consciemment, par le pouvoir d’attraction de certaines pratiques artistiques. Tania joue des narrations entre textes et images, Youri écrit de la poésie et n’a jamais encore exposé, Mahalia est sculptrice, Diego est peintre. Chacune de leurs démarches va bien au-delà de la simple application d’une technique à un support quel qu’il soit. La trentaine à peine dépassée ou pas encore, ces quatre artistes sont invité.e.s à exposer une sélection d’œuvres existantes afin de dessiner ensemble un paysage sentimental, celui d’un rêve, d’une vision, d’un monde souterrain en train d’émerger.
Alors que notre approche s’abandonne dans une rêverie poétique, cette exposition est une excavation, une extraction où l’on fouille, creuse et explore ces œuvres qui envoûtent jusqu’au temps du rêve : sculptures-carcasses mi-humaines, récits mythologiques parfois mystiques ou animistes emplis d’animaux, de végétaux, de fragments de bois et de formes miroitantes ou lanternes magiques qui nous parlent, nous attirent. Sursaut mêlé de réel et de songes, ces œuvres-talismans (s’)accrochent avec amour comme des armes forgées et ciselées par des états d’âme ou des souvenirs d’étreintes, histoires d’alliances ou de complicités et autres alliages en tout genre. Ce qui nous affecte résiste par l’intime, les mélancolies et les espoirs.
Marianne Derrien, commissaire d’exposition, 2020
© Salim Santa Lucia